/

Prévention des complications des immunosuppresseurs : Une innovation au service des patients

Prévention des complications des immunosuppresseurs : Une innovation au service des patients
Publié le 12/06/2025
Quimper

Les maladies auto-immunes représentent la 3e cause de morbi-mortalité en France et dans les pays industrialisés, après les maladies cardiovasculaires et les cancers. Une étude britannique récente parue dans The Lancet en 2023, portant sur plus de 22 millions de personnes suivies pendant 20 ans, révèle qu’environ 10 % de la population pourrait être touchée par une ou plusieurs de ces maladies, avec une fréquence en constante augmentation.

Ces pathologies, dans lesquelles le système immunitaire se retourne contre l’organisme, peuvent cibler un seul organe — comme la thyroïde (maladie de Basedow), le pancréas (diabète de type 1), ou encore la peau (vitiligo) — ou toucher plusieurs systèmes à la fois, comme dans les cas de lupus, de sclérodermie ou de vascularites. Les traitements reposent souvent sur des médicaments immunomodulateurs ou immunosuppresseurs visant à contenir l’activité excessive du système immunitaire, tout en préservant sa fonction essentielle de défense contre les infections et les cancers.

Ces traitements, bien que très efficaces, exposent à des effets indésirables parfois sévères : risques infectieux accrus, complications métaboliques, atteintes osseuses, troubles neuropsychiatriques, etc. La prévention de ces effets est donc un enjeu majeur du parcours de soins. Pourtant, en pratique, moins de la moitié des mesures recommandées pour limiter ces complications sont appliquées, notamment en raison du manque de temps en consultation et de la complexité des informations à transmettre à des patients souvent bouleversés par l’annonce d’un diagnostic chronique.

Un projet innovant au Centre Hospitalier de Cornouaille : un hôpital de jour dédié à la prévention

C’est face à ce constat qu’est né, à Quimper, un projet innovant : la création d’un hôpital de jour (HDJ) de prévention des complications liées aux traitements immunosuppresseurs, avec un double objectif : améliorer la sécurité des traitements et renforcer l’accompagnement des patients. Ce projet a été impulsé dans le cadre de la labélisation du CH de Cornouaille en tant que Centre de Compétence des Maladies Auto-Immunes et Autoinflammatoires Rares (été 2023).

L’originalité de ce HDJ repose sur une approche multidisciplinaire, alliant expertise médicale et éducation thérapeutique. Grâce à l’engagement des pharmaciens hospitaliers, déjà formés à l’éducation thérapeutique dans d’autres secteurs comme l’oncologie, des outils pédagogiques ont été conçus, validés par les médecins spécialistes, et intégrés dans le parcours des patients. L’équipe médicale et soignante de l’hôpital de jour de médecine (Dr Marc Coustans, Hélène Caudan et les infirmier·ère·s) a rapidement adhéré au projet et en a soutenu le développement.

Un fonctionnement coordonné et réactif

Concrètement, le HDJ peut être proposé dès le diagnostic, avec un accès rapide (moins de deux semaines) afin d’agir le plus tôt possible. À la demande du médecin spécialiste, le patient bénéficie d’un programme personnalisé, comprenant systématiquement une consultation pharmaceutique d’une heure. Celle-ci permet d’aborder tous les aspects du traitement : mécanisme d’action, effets indésirables potentiels, vaccination, hygiène de vie, suivi biologique, etc.

D’autres interventions peuvent être ajoutées selon les besoins : consultation diététique, vaccination, éducation à l’auto-injection, soins infirmiers (bilans biologiques, perfusion de biphosphonates, ECG, dépistage HTA ou diabète), examens complémentaires (imagerie), voire des avis spécialisés (ophtalmologie, dermatologie…).

Un compte-rendu est systématiquement transmis au médecin traitant et au pharmacien d’officine pour assurer une continuité de la prise en charge.

Un bilan très positif après un an de mise en œuvre

Depuis le lancement du dispositif en mars 2023, 315 patients ont été pris en charge, soit une moyenne de 12 patients par mois. Si la médecine interne représente près de la moitié des patients suivis, le dispositif s’est progressivement ouvert à d’autres spécialités, y compris la pédiatrie. Environ 50 % des patients ont bénéficié d’une initiation à une biothérapie injectable, et l’autre moitié d’un traitement par corticothérapie ou immunosuppresseur conventionnel.

L’adhésion des patients et des professionnels de santé témoigne de la pertinence du dispositif, qui allie sécurité, réactivité et pédagogie. Un projet de suivi au long cours est d’ores et déjà en réflexion, dans le cadre d’un programme structuré d’éducation thérapeutique.

Une initiative au service de la qualité des soins

Le Centre Hospitalier de Cornouaille, par cette initiative, affirme son engagement dans une prise en charge globale et sécurisée des patients atteints de maladies auto-immunes. Ce HDJ de prévention illustre parfaitement la capacité d’innovation d’un établissement de proximité, en s’appuyant sur les compétences croisées de ses professionnels de santé pour améliorer concrètement le quotidien des patients.